31èmes Journées Nationales du Syndrome de Rett

Les 31èmes Journées Nationales du Syndrome de Rett de l’AFSR se sont déroulées les 5 et 6 octobre 2019 à l’hôtel Ibis Paris 17 Clichy-Batignolles et ont accueilli plus de 240 personnes.
Cet événement dédié au syndrome de Rett, et plus largement au polyhandicap, était ouvert aux familles, mais aussi pour la première fois, aux proches ou aidants d’une personne atteinte du syndrome de Rett, aux professionnels de santé, scientifiques, personnels de centres spécialisés, et étudiants, à tarif préférentiel.

Un vaste programme de conférences a été proposé aux participants durant deux jours. L’Association Française du Syndrome de Rett remercie chaleureusement l’ensemble des professionnels qui ont répondu présent pour animer ces conférences.

Le programme était le suivant : 

Voici les compte-rendus de chaque conférence et atelier. Nous remercions chaleureusement les personnes qui ont contribué à leur rédaction :

Sandrine Balza, Elsa Coucheney, Margo Debaty, Jean-Luc Legras, Odile Parmentier, Anne-Sophie Pierson

Allocution de bienvenue et ouverture du congrès

Julien Fieschi, président de l’Association Française du Syndrome de Rett

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Julien Fieschi se présente ainsi que le conseil d’administration (15 membres).

Il continue en présentant les 4 axes prioritaires de l’association pour la période 2020-2025 (https://afsr.fr/orientations-2020-2025/) :

  • Consolider et garantir le fonctionnement de l’association ;
  • Devenir un promoteur central de la recherche médicale sur le Rett en Europe ;
  • Améliorer le conseil et la diffusion d’informations aux parents ;
  • Apporter des solutions et des aides aux familles.

Ces 4 axes prioritaires vont guider l’action de l’association durant les 5 prochaines années.

Il annonce également qu’une grande consultation sera lancée en novembre vers tous les adhérents de l’AFSR pour recueillir leurs avis et opinions sur différents sujets.

Il présente brièvement les 23 filières de santé maladie rares issues du 3ème plan ‘Maladies rares’ du ministère de la santé (2018-2020). Le syndrome de Rett est inclus dans plusieurs filières dont la principale est ‘Défiscience’ (https://www.defiscience.fr/). Il rappelle qu’il existe en France 27 centres de référence et 79 centres de compétences. Il est intéressant d’utiliser les centres de compétence de nos régions, non seulement pour avoir un suivi de proximité (notamment en cas d’urgence) mais également pour que les connaissances des professionnels de santé sur le syndrome de Rett se développent aussi dans ces centres (et ne restent pas seulement concentrées sur quelques endroits du territoire).

Il décline enfin la stratégie de recherche de l’AFSR pour la période 2020-2025. Jusqu’à maintenant l’AFSR a soutenu un total de 62 projets de recherche pour un montant total de 1 200 000 euros. L’AFSR va dorénavant articuler ses projets de recherches autour de deux axes clairs:

  • Traitement symptomatique de la maladie ;
  • Recherche d’un traitement curatif du syndrome.

A cette occasion, il annonce le lancement durant le mois d’octobre qui est le mois de sensibilisation du Syndrome de Rett, d’un appel à dons via les adhérents de l’association pour financer un appel à projet d’un montant de 200 000 euros pour travailler sur des thérapies innovantes (génétique ou cellulaire).


L’espoir d’une thérapie génique dans le syndrome de Rett

Jean-Christophe Roux, directeur de recherche INSERM, MMG – Aix-Marseille Université/Inserm

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Membre du Conseil Médical et Scientifique de l’AFSR, le Dr Jean-Christophe Roux est directeur de recherche à l’INSERM de Marseille au sein de l’équipe Neurogénétique Humaine, dont les deux thèmes d’études principaux sont le syndrome de Rett et les encéphalopathies épileptiques précoces.

La recherche médicale et scientifique et les essais cliniques suscitent toujours beaucoup d’intérêt au sein de l’association. La thérapie génique est un des sujets les plus sollicités par les parents.
Les espoirs sont grands pour les familles, mais que peut-on vraiment espérer ? Où en est-on ?

 

Jean-Christophe Roux nous a présenté un résumé à la fois des difficultés et de la complexité de la thérapie génique dans le syndrome de Rett ainsi que les avancées et les espoirs.

On peut rappeler qu’il existe deux grands types de recherche thérapeutique, la pharmacologie (largement dominante) qui a une action à court terme et traite les symptômes et les thérapies de substitution (thérapie géniques, réactivation du chromosome X et passage forcé du codon stop) qui visent à traiter les causes (« corriger » les mutations génétiques dans notre cas).

Parmi ces dernières on peut distinguer :

1-thérapie de passage forcé du codon stop (pour certains types de mutation uniquement – mais représentant 50% des patients ayant Rett)

2-la réactivation du chromosome X (un seul X étant activé dans chaque cellule la réactivation du second chromosome X ne possédant pas la mutation dans les cellules malades devrait guérir ces cellules)

3-thérapies génique visant à introduire un gène fonctionnel à l’aide d’un vecteur viral ou non-viral.

Définition de la thérapie génique : introduire des acides aminés (blocs de base du code génétique, ADN) dans les cellules pour altérer l’évolution d’une condition médicale. A l’heure actuelle, 60% des essais de thérapie génique sont développés dans le contexte de la recherche sur le traitement des cancers.

Le syndrome de Rett est un bon candidat pour la thérapie génique puisqu’il est mono-génétique et que sa réversibilité a été démontrée chez la souris. Dans le cadre du syndrome de Rett cette thérapie se heurte aux difficultés suivantes:

  • Taux d’infection faible dans le cerveau par les vecteurs viraux transportant le gène MECP2 car le système nerveux central est protégé par la barrière hématoencéphalique.
  • Non sélectivité des vecteurs qui infectent pareillement les cellules saines non malades (ayant le chromosome X non muté activé, et le chromosome X muté inactivé) que les cellules malades et, entraînant dans ces dernières un surdosage et plus globalement des symptômes neurologiques graves.

Il existe deux types de vecteurs utilisés pour les essais de thérapies géniques : les liposomes (vésicules de lipides contenant de l’ADN nu) et les virus. Les premiers présentent une possible toxicité et la pénétration cellulaire est faible. Les virus ont une meilleure pénétration cellulaire mais peuvent contenir qu’une quantité limitée d’ADN (ils contiennent par exemple uniquement le gène d’intérêt si celui-ci n’est pas trop long mais fort heureusement c’est le cas avec MECP2). Ils peuvent néanmoins produire une réaction immunitaire mettant en péril l’action effective de la thérapie génique (cas où la patiente a déjà été en contact avec le vecteur viral).

Jean-Christophe Roux revient sur les travaux majeurs qui ont montré la réversibilité des symptômes chez la souris par introduction du gène MECP2 en thérapie génique. On pourrait donc, en théorie, intervenir à tout moment / tout âge pour guérir une personne atteinte du syndrome de Rett. Ces travaux pré-cliniques chez la souris ont été menés préventif par injection du gène directement dans le cerveau à la naissance chez des souris modèles du syndrome de Rett.  Malheureusement ces superbes résultats ont été obtenus de manière préventive avant même que la pathologie ne soit installée.  Par la suite, il a été montré qu’une injection intraveineuse chez ces mêmes souris modèles plus âgées (présentant la pathologie), donne des résultats moins convaincants avec une amélioration clinique beaucoup moins importante.  Par ailleurs, on observe un problème de reproductibilité entre travaux de différentes équipes.

Dans l’équipe de Jean-Christophe Roux à Marseille :

-utilisation du virus AAV9-Mecp2 comme vecteur de thérapie génique chez la souris modèle

-injection à 30 jours (quand les symptômes apparaissent)

-Imagerie pour détecter l’expression de MECP2 dans des tranches de cerveau qui permet de quantifier le taux d’infection, il est faible avec seulement 10% des cellules qui intègrent le gène.

-chez le mâle, malgré ce faible taux, on note une amélioration notable de la condition des souris (poids, survie et apnées).

chez la souris femelle : on note également une amélioration mais aussi une toxicité cellulaire, avec notamment des anomalies au niveau du foie.

Comment contrer ces effets indésirables ? Il y a deux axes de recherche :

  • modifier le virus pour que celui-ci vise uniquement les cellules cérébrales
  • contrôler l’expression de MECP2 dans le foie. Cela passe par l’introduction de fragments supplémentaires d’ADN contenant des parties régulatrices pour l’expression du gène dans le vecteur et par l’utilisation d’un fragment réduit du gène En effet il y a eu des essais utilisant uniquement 33% du gène et avec des parties régulatrices importantes montrant de bons résultats sans effets secondaires visibles chez la souris mâle. Des essais cliniques sont en préparation par une compagnie privée (Avexis) et le traitement était même arrivé sur le marché mais celui-ci vient d’être mis en Stand-by, car des vérifications sur de possibles effets secondaires non révélés ont été demandé.

Méthode alternative testée à Marseille : travail avec la BDNF, une « super-vitamine » neuronale qui favorise la connectivité neuronale. On sait que chez les patientes Rett les neurones sont plus petits et moins bien connectés et on sait également que la BDNF est en quantité réduite chez ces même patientes (quand MECP2 n’est pas présent). Les chercheurs étudient donc la possibilité d’introduire la BDNF à l’aide d’un vecteur viral dans les cellules du cerveau. Un autre avantage du BDNF (par rapport à MECP2) est qu’il est libéré à l’extérieur de la cellule et a donc qu’il a une action également sur les cellules voisines de celles effectivement infectées par le virus vecteur. L’équipe a obtenu de très bon résultats chez la souris mâle (essais chez la femelle à venir avec un contrôle particulier sur des effets indésirables cités ci-dessus : toxicité et duplication). L’équipe étudie également, en collaboration avec des physiciens, l’utilisation d’ultrasons pour ouvrir temporairement la barrière hemato-encéphalique afin de favoriser le passage du vecteur viral et d’augmenter le taux d’infection des cellules cérébrales par le virus.

Autre approche d’intérêt : Réparer le morceau d’ADN muté par la technique des Ciseaux moléculaires (Crispr/Cas9). Cette technique marche uniquement pour certains types de mutation et elle fonctionne très bien en boite de Pétri mais elle est difficile à utiliser actuellement in vivo car on a besoin de 2 vecteurs viraux, un pour les ciseaux moléculaires et un pour réparer le gène sain. Il faudrait donc être sûrs que les 2 vecteurs infectent strictement les mêmes cellules).

Place aux questions : discussion autour du prix du traitement de thérapie génique proposé par une compagnie privée mis en stand-by (très cher) ; effets de traitements sur la microcéphalie chez la souris ? -Eventuellement une légère croissance mais rien de prouvé ; pourquoi les symptômes apparaissent ou évoluent à certaines périodes ? – on pense que c’est lié à l’importance du gène MECP2 dans certaines phases de développement où le cerveau s’organise ; Naît-on malade ?- il semble que de faibles anomalies biologiques liées à des mutations dans MECP2 peuvent être détectées dès la naissance mais elles seraient compensées jusqu’à un certain stade de développement.

Quid de la mention ‘Retard mental sévère’ sur le site de l’AFSR ? Site web CAApable ; discussion autour des logiciels de communication, commande oculaire, PODD sur ordi, Mindexpress…


La communication dans le syndrome de Rett

Susan Norwell, éducatrice spécialisée et co-fondatrice de Rett University (USA)

Accédez à la vidéo diffusée lors de cette conférence

Susan Norwell est une des co-fondatrices de Rett University et possède plus de 40 années d’expérience professionnelle dont plus de 30 consacrées au syndrome de Rett.

En véritable passionnée, elle a pu travailler tout au long de ces années auprès de plus de 300 personnes atteintes du syndrome de Rett. Si Susan est certaine d’une chose, c’est que si l’on est convaincu de leurs compétences, les possibilités sont étendues.

La vidéo rassemble des messages et des conseils illustrés par des vidéos, des instants de travail entre Susan Norwell et des enfants atteintes du syndrome de Rett judicieusement sélectionnés.

Ainsi, elle a partagé, à travers ce film enregistré spécialement pour ces 31èmes Journées Nationales du Syndrome de Rett, ce qu’elle a appris des personnes présentant un syndrome de Rett sous la forme de son « Top 10 » :

  • les outils de communication alternatifs : « never too early, never too late »jamais trop tôt, jamais trop tard ;
  • croire aux compétences de nos enfants et aux possibilités ;
  • les croire / les savoir capables ;
  • c’est le corps qui ne coopère pas et il est donc très difficile de donner une réponse à une directive dans ces conditions, ou de répondre à une question directe : c’est à cause de la dyspraxie, il faut leur laisser du temps ;
  • les évaluations doivent tenir compte de cela, et doivent être dynamiques (pas isolées) ;
  • observer et décrypter ce que nos enfants savent déjà faire, y mettre du sens ;
  • apprendre à lire et à écrire (elle cite deux exemples : une petite fille de 5 ans qui connait toutes les lettres et leurs sons, une femme de 33 ans parfaitement lettrée). Avoir des attentes très élevées ;
  • lire les messages corporels et interpréter (aussi les sentiments) ;
  • donner l’exemple (montrer / prendre les images / pictos), être investi : il ne s’agit pas d’apprendre des symboles sortis de leur contexte mais de les utiliser sur le terrain et pour communiquer directement.
  • recommandations : utiliser la commande oculaire dès que le diagnostic est posé et montrer l’exemple, communiquer soi-même avec ces outils de communication alternative et en utilisant les pairs : copains, frères et sœurs, entourage…) ; participer et pratiquer.

Aller plus loin:
http://www.focusedlearningsolutions.com
http://rettuniversity.org/flipbookdemo/


La motricité dans le syndrome de Rett

Professeur Meir Lotan, kinésithérapeute et Professeur d’Université à Tel Aviv (Israël)

Accédez à la vidéo diffusée lors de cette conférence

Meir Lotan M.Sc.PT Ph.D. est kinésithérapeute et Professeur d’Université à Tel Aviv.

Il a travaillé avec des filles atteintes du syndrome de Rett au cours des 26 dernières années. Il fait partie de l’équipe nationale d’évaluation d’Israël et a reçu en consultation environ 500 filles atteintes du syndrome de Rett à travers le monde. Il travaille comme physiothérapeute avec 15 filles chaque semaine. Il a écrit 30 articles et 4 livres sur le syndrome de Rett et a mené de nombreux programmes de recherche sur ce sujet.

La vidéo nous présente l’évaluation de Sophia, une petite fille de 6 ans, atteinte du syndrome de Rett et marchante (en ‘bonne condition physique’).

Messages / conseils clés : préserver sa motricité et stimuler l’utilisation de ses mains par des exercices à la fois actifs et passifs, en alternance. Augmenter la durée des exercices graduellement.

Autres conseils délivrés :

  • expressions de mécontentement : essayer de discerner si l’enfant est réellement en détresse ou pas motivé / fatigué ;
  • travailler sur la motivation
  • exercices intégrés au quotidien de la famille
  • utilisation d’une ceinture souple / élastique contre les ballonnements
  • préparer l’enfant à l’avance pour des situations nouvelles potentiellement angoissantes pour lui/elle
  • coussins d’air contre les ballonnements
  • plaque vestibulaire ++++ (équilibre, phobie des mouvements et ballonnements)
  • moments de détente, de récupération : massages, lumières douces, watsu, snoelezen
  • phobie des mouvements dans le syndrome de Rett : trouver des motivations pour s’entraîner à bouger / changer de position (musique, danse, chansons enfantines où on fait bouger l’enfant dans différentes positions)
  • mains : rester active, trouver des routines, des actes de la vie quotidienne où l’enfant pourrait aider
  • dos : une scoliose peut n’apparaître que dans certaines positions
  • travailler les transitions
  • escaliers : peur, pratiquer tous les jours, changer les méthodes (s’aider à droite / s’aider à gauche / tenir la main / tenir la rambarde…), activer, motiver tout le temps.

Aller plus loin:
https://www.ariel.ac.il/wp/physiotherapy/en/
https://scholar.google.com/citations?user=p0mI_RgAAAAJ&hl=en

 


Génétique et mutations

Professeur Laurent Villard, directeur de recherche – Faculté de médecine La Timone à Marseille

Le Professeur Laurent Villard est directeur de recherche à l’INSERM de Marseille au sein de l’équipe Neurogénétique Humaine, dont les deux thèmes d’études principaux sont le syndrome de Rett et les encéphalopathies épileptiques précoces. Il a présidé le Conseil Médical et Scientifique de l’AFSR pendant de nombreuses années.

Il a abordé lors de cet atelier, à travers de courtes vidéos très ludiques, les notions de génome, ADN, mutation et gène. Le corps humain est constitué de milliards de cellules issues d’une première cellule qui s’est divisée pour en produire de nouvelles. Dans chacune d’entre elles, il y a un noyau qui renferme toute notre information génétique, répartie sur 46 chromosomes (23 paires) constitués d’ADN. L’ADN est formé de deux brins enroulés l’un autour de l’autre pour former une double hélice. Chacun de ces brins est constitué de quatre nucléotides, A, C, G et T (Adénine, Cytosine, Guanine ou Thymine) liés entre eux formant ainsi une chaîne. L’ordre dans lequel se succèdent les nucléotides le long d’un brin d’ADN constitue la séquence de ce brin. C’est cette séquence qui porte l’information génétique. Celle-ci est structurée en gènes qui ne constituent que 2 % de tout l’ADN. La succession des bases nucléiques sur les gènes de l’ADN détermine la succession des acides aminés qui constituent les protéines issues de ces gènes. La correspondance entre bases nucléiques et acides aminés s’appelle le code génétique. L’ensemble des gènes d’un organisme constitue son génome.

Le génome est en quelque sorte un plan détaillé de notre corps avec des instructions qui permettent son bon fonctionnement. Á la lecture de ce « plan », le corps produit tout ce dont il a besoin pour grandir, se développer, se défendre des agressions extérieures : en un mot, pour vivre !

Or, il arrive que ce « plan » comporte des anomalies qui peuvent être responsables de maladies génétiques. Ces anomalies se produisent lors de la division cellulaire. Chaque cellule qui se divise pour créer deux nouvelles cellules va dupliquer son ADN. Une cellule duplique son ADN en sept heures ce qui signifie que 200 000 nucléotides seront dupliqués par seconde. Des erreurs de copie se produisent. Si l’anomalie résulte d’un problème au niveau du chromosome, on parle d’anomalie chromosomique. Ce type d’anomalies peut être dû à la présence d’un chromosome supplémentaire sur une des paires (trisomie) ou à l’absence d’un chromosome sur une des paires (monosomie).
Si l’anomalie résulte de la modification d’un gène (ADN) on parle généralement de mutation. Ces mutations peuvent entraîner des dysfonctionnements plus ou moins graves du corps humain : on parle alors de maladies génétiques.
On estime qu’il y a de l’ordre de 60 erreurs de copie de type mutations pour une nouvelle cellule sexuelle (spermatozoïde ou ovule) et 120 mutations pour une nouvelle cellule de l’embryon ce qui donne, les gènes ne représentant que 2 % de l’ADN, deux mutations dans les gènes de chaque nouvelle cellule de l’embryon. Le résultat d’une analyse génétique est exprimé selon une codification qui permettra à tout professionnel de savoir pour un gène donné quelle est la position dans l’ADN ou dans la protéine de la mutation et par quel nucléotide ou protéine est remplacé le nucléotide ou la protéine ayant subi la mutation.

Depuis que l’on a commencé à séquencer le génome humain, on s’est rendu compte que chaque individu est unique sur le plan génétique (avec 0,1 % de différence entre deux individus soit trois millions de variants génétiques), c’est pourquoi on parle plus souvent maintenant de « variants » plutôt que de « mutations ». Un classement des variants a été défini et détermine cinq types de variants : variant bénin, probablement bénin, de signification inconnue, probablement pathogène, pathogène.

Pour le syndrome de Rett, on constate que huit variants ou mutations représentent 65 % de tous les variants ou mutations observés. Entre deux personnes ayant la même mutation, les symptômes ne seront pas les mêmes. En effet, les personnes ayant le syndrome de Rett sont de sexe féminin et ont donc deux chromosomes X, donc deux copies du gène MECP2 qui est porté par le chromosome X. La mutation n’existe que sur l’un des deux gènes. Or un seul gène sera utilisé par la cellule à cause d’un mécanisme d’inactivation qui empêche l’expression de tous les gènes d’un chromosome X sur les deux disponibles. Chaque personne est donc une « mosaïque » de cellules qui expriment le chromosome avec le gène muté ou cellules « malades » et de cellules qui expriment le chromosome avec le gène normal. La proportion entre les cellules « malades » et les autres cellules varie selon les personnes de 30/70 à 70/30. Ainsi, deux personnes qui ont la même mutation n’auront pas nécessairement la même répartition entre les cellules malades et les autres cellules, c’est pourquoi elles n’auront pas les mêmes symptômes.

Commande oculaire et logiciel libre et gratuit

Didier Schwab, maître de conférences à l’Université de Grenoble

Accéder au diaporama présenté lors de cette conférence

L’atelier commande oculaire et logiciel libre de droit1 a été conduit par Didier Schwab. Il se présente à double titre comme le papa de Tess, 7 ans, porteuse du Syndrome de Rett et en tant que chercheur en informatique. Actuellement maître de conférences, attaché à l’université de Grenoble, ses travaux se concentrent autour de 4 axes regroupant l’informatique, la cognition, les interactions Homme-Machine et la linguistique. Autrement dit comment communiquer grâce à la machine en contexte multilingue ou avec des personnes à besoins spécifiques notamment avec la Communication Augmentée Alternative – CAA.

Il existe différents types d’outils CAA et de techniques : objets tangibles, gestes, pictogrammes, logiciels de synthèse vocale, oculomètres (ou eye-tracker).

Choisir un outil de CAA pour une personne polyhandicapée ; c’est se poser des questions sur la pertinence du contenu de l’outil sans négliger son ergonomie à savoir la manière dont l’outil pourra être manipulé. L’utilisation du regard afin d’interagir avec l’environnement est souvent considéré pour une personne polyhandicapée comme l’un des moyens de communication les plus naturels et faciles à mettre en œuvre. Néanmoins l’enfant devra apprendre le pouvoir de ses yeux, comprendre les conséquences des actions déclenchées par son regard et entraîner ses muscles extra-oculaires.  C’est par le biais de jeux adaptés que l’enfant peut faire cet apprentissage destiné à permettre l’utilisation de logiciels de communication utilisant des pictogrammes.

Didier Schwab et son équipe ont développé des jeux libres et gratuits regroupés sous le site http://Gazeplay.net.  La soixantaine de jeux actuellement proposés sont compatibles avec n’importe quel oculomètres, ils sont en source ouverte (open source) afin de développer plus facilement une communauté (parents, aidants, institutions spécialisées) et assurer une pérennité. L’Utilisation de Java facilite son développement sur de nombreuses plateformes. Il est gratuit pour le rendre accessible au plus grand nombre. Les Jeux ont été conçus grâce aux retours d’aidants, de professionnels, d’étudiants et initialement de 3 petites filles Rett

Le regard de la personne est capté par un oculomètre (eye-tracker), qui va en quelque sorte remplacer la souris. Il s’agit d’une sorte de barrette longiligne qui se fixe au bas d’un écran d’ordinateur. Il s’agit d’une technologie déjà ancienne utilisée depuis plus de 30 ans dans le domaine du handicap. Des eye-trackers destinés au monde du jeux vidéo (Tobii 4C par exemple) et aux caractéristiques similaires à ceux du monde du handicap (Tobii PCEyeGo par exemple) existent.

Le tableau ci-dessous en présente une comparaison :

Selon l’American Speech Language Hearing Association, la CAA répond aux besoins des individus avec des troubles de communication importants et complexes qui sont caractérisés par des déficiences dans le langage. La communication est augmentée pour compléter un langage préexistant, elle est alternative en remplacement d’un langage non existant ou dysfonctionnel.

Certains logiciels CAA sont directement compatibles avec les eye-trackers comme GazeSpeaker (gratuit) ou GazePlay. D’autres nécessitent de passer par la souris : Gaze Mouse (libre et gratuit) ou chez Tobii GazePoint , gratuit et largement suffisant pour les personnes porteuses du syndrome de Rett. Il permet de contrôler un dispositif windows (sur ordinateur, ordinateur tactile chevalet, ordinateur fixe avec chariot mobile ou tablette) avec 4 Go de RAM.

Le matériel et les logiciels ne sont plus un problème financier c’est avant un problème de formation et de sensibilisation des parents, des aidants, des professionnels…

Contact : gazeplay.net@gmail.com

  1. L’atelier a finalement été renommé InterAACtions par le regard, les mots et les pictogrammes : GazePlay, jeux sérieux et autres réflexions sur la Communication Alternative et Augmentée


Troubles digestifs (Dr Pigneur)

Les troubles digestifs chez les personnes atteintes du syndrome de Rett sont sous-estimés. Peu d’articles scientifiques ont été publiés et la recherche à ce sujet demande à être développée.

Environ 75% de cette population présente des troubles digestifs et 50% aura des problèmes nutritionnels, ce qui altère leur qualité de vie.

Parmi les troubles digestifs, on trouve entre autres le reflux gastro-oesophagien (RGO) et la constipation.

Parmi les troubles digestifs hauts, on a :

  • Les troubles de la déglutition et de la mastication (50% des personnes atteintes du syndrome de Rett présentent des troubles de la mastication). Ces troubles peuvent être la conséquence d’une mauvaise posture ou de mouvements anormaux de la langue.
  • Anomalies du réflexe nauséeux, qui, normalement est situé à la base de la langue.
  • Vomissements, qui peuvent être d’origine neurologique ou comportementale.
  • Fausses routes.
  • Reflux gestro oesophagien (RGO)

 

Concernant le RGO :

Le corps humain possède ses propres mécanismes anti-reflux : le sphincter inférieur de l’oesophage, la clearance oesophagienne et la vidange gastrique.

Parfois le mauvais positionnement de la personne et éventuellement des problèmes anatomiques ainsi que la texture de la nourriture ingérée peuvent entrainer des remontées du liquide gastrique dans l’œsophage et donc un RGO.

Diagnostic :

Le diagnostic clinique reste le meilleur moyen de le détecter (régurgitations, vomissements, rumination….) mais parfois d’autres signes comme une perte de poids, un refus alimentaire, un état respiratoire aggravé, de l’agitation, une automutilation ou une anémie peuvent alerter également.

Uniquement en cas d’hésitation, des examens complémentaires peuvent être effectués, comme une pH-métrie (qui permet de détecter les moments de la journée ou de la nuit où le reflux est plus important), monométrie ou une fibroscopie (mais qui ne met en évidence le RGO que si l’œsophage a des lésions) .

Prise en charge :

On peut avoir recours

  • à un traitement médical :

-les IPP (inhibiteurs de la pompe à proton) qui empêchent les sécrétions acides mais pas les remontées

-Anti H2

-Bétanéchol qui favorise la contraction du sphincter de l’œsophage mais qui a des effets indésirables et qui n’est délivré que dans les pharmacies hospitalières.

  • à un traitement chirurgical si le traitement médical est un échec (Nissen par exemple)
  • Le régime alimentaire peut également aider à l’amélioration du RGO (éviter les tomates, agrumes et le chocolat par exemple).

Concernant la constipation :

Définition : émission de moins de trois selles par semaine pendant deux semaines

85% des personnes atteintes du syndrome de Rett sont concernées.

Diagnostic :

Le diagnostic clinique se base, en plus de la définition, sur la présence de ballonnements associés ou non à des douleurs.

Prise en charge :

Une forte hydratation est le premier « traitement » à mettre en place, l’activité physique (quand c’est possible) et l’ingestion de fibres (son de blé par exemple) peuvent également améliorer le transit.

On peut associer cela à un traitement médical de type laxatif (PEG) et en cas de besoin à des lavements.

La kinésithérapie et le nursing (massages…) sont également bénéfiques.

Même s’il n’y a pas de retour scientifique, on peut également tester une cure d’un mois de pré/probiotiques.

Concernant les troubles de l’alimentation :

Constat : Environ 90% des personnes atteintes du syndrome de Rett ont des troubles de l’alimentation, qui ont tendance à s’aggraver avec l’âge.

Les enfants atteints mangent seulement les 2/3 de la ration calorique normale d’un enfant du même âge non malade.

Cela peut conduire à de la dénutrition, un retard de croissance staturo-pondéral, des carences vitaminiques (en particulier en fer) et également à une aggravation de l’ostéoporose.

Il est conseillé de faire une évaluation régulière du poids et de la taille, une évaluation diététique précise ainsi qu’une évaluation des troubles de la déglutition.

Prise en charge :

Une augmentation sur mesure des aliments ingérés suite aux évaluations précédentes peut être mise en place. La prise de repas fractionnés et fréquents ainsi que de compléments alimentaires peut être proposée. Il n’est pas conseillé de mettre en place des restrictions alimentaires (gluten, lactose…).

Les difficultés alimentaires (troubles de la déglutition…) peuvent être prises en charge par un suivi orthophonique.

Selon le bilan avec des professionnels, une sonde nasogastrique ou une gastrostomie peuvent être proposées.

La gastrostomie a plusieurs avantages : moins de risque d’obstruction, changement de matériel moins fréquent, invisible sous les vêtements, moins de complications que la sonde nasogastrique et n’empêche pas l’alimentation par voie orale ni la prise en charge des troubles de l’oralité (qui peuvent être générés ou exacerbés par la présence de la sonde nasogastrique).


Remerciements

Pour ses 31èmes Journées Nationales du Syndrome de Rett, l’AFSR remercie chaleureusement l’ensemble des participants, ainsi que :

Dr Jean-Christophe Roux, M. Luc Rivoira, Mme Sabine Blanchard, Mme Mélanie Toulouse, Mme Myriam Fieschi, Mme Sabrina Tramaille-Bryon, Pr Raphaël Vialle, Pr Brice Illharreborde, Dr Bénédicte Pigneur, Pr Laurent Villard, Pr Mathieu Milh, Mme Jeanne Mendelssohn, M. Didier Schwab pour leurs interventions durant ce week-end.

Susan Norwell et Meir Lotan pour avoir enregistré ces vidéoconférences à l’occasion de notre événement.

Les fondations Apicil, Groupama pour la Santé, EDF, la société Inédit Immobilier, ainsi que la direction d’Eurosport et l’ensemble de son personnel pour leur soutien financier.

Toute l’équipe adresse un remerciement spécial aux bénévoles qui ont répondu présents pour nous apporter aide et soutien lors de ce week-end ainsi qu’à l’élaboration des comptes-rendus.

Á tous, un immense merci !